Les derniers jours JULIA VERLANGER
Les derniers jours JULIA VERLANGER
Depuis la publication de sa première nouvelle, « Les bulles », dans le numéro 35 de « Fiction », Julia Verlanger est devenue un des auteurs spécialisés de science-fiction littéraire en France. Dans le nouveau récit que vous allez lire, elle reprend un thème d'anticipation classique (que vous avez déjà vu traité notamment par Ward Moure) et en tire la matière d'une évocation réaliste et cruelle. Le meilleur éloge que nous puissions lui faire sera de dire qu'elle ne sort pas à son désavantage de la comparaison avec l'auteur américain, malgré les dimensions plus vastes données par celui-ci à son tableau2 .
D'accord, c'est pas marrant de vivre comme ça. Mais tout de même, Man devrait essayer de faire un effort. Elle est là, dans la caverne, elle bouge pas de toute la journée. Et elle se lave même plus. Elle est d'un sale ! Ses cheveux lui pendent dans la figure, tout graisseux.
J'ai bien essayé deux ou trois fois de la traîner jusqu'à la rivière, mais j'ai pas pu y arriver. Dès que je lui parle brusque, ou que je la bouscule un peu, ses yeux deviennent tout vitreux de terreur. On dirait qu'elle me reconnaît plus. Y a rien d'autre à faire que de la laisser tranquille. Elle reste toute la journée assise dans son coin, à regarder dans le vide. Quand je lui apporte à manger, elle mange, c'est tout.
Quand on pense comme elle était, Man, dans le temps ! Si jolie ! Les copains disaient que j'avais la plus jolie maman de tout le quartier. J'étais drôlement fier de les amener chez nous. On avait une maison rudement bath. Et Man, elle était pas toujours à grogner. Quand on cassait quelque chose, ou qu'on faisait du bruit, elle en faisait pas un drame. Ça oui, je peux dire qu'elle était chouette, Man.
Je me rappelle, quand Pa rentrait, le soir. On rigolait tous les trois. On regardait la télé, ou bien on allait au cinoche. On était rudement heureux ! C'était le bon temps ! Et Man, elle faisait de ces gâteaux ! Mmmmmmm ! On s'en léchait les doigts.
Ben merde ! Des gâteaux, ça fait rudement longtemps que je sais plus ce que c'est !
C' que Man est devenue ! On peut pas se figurer. Elle est comme ça depuis que ces types sont venus. Je crois que je comprends un peu, tout de même. Elle a dû recevoir un drôle de choc. Moi, j'ai rien pu voir, parce qu'y m'ont assommé presque tout de suite, mais Man… J'ai jamais pu lui en parler. Du reste, je pourrais pas. Elle parle plus beaucoup, Man, et elle a pas l'air de trop bien comprendre ce que je lui dis.
Je me suis plutôt bien adapté, moi, faut dire. Les copains feraient une sacrée bouille, s'y pouvaient me voir. J'attrape les poissons avec mes doigts, dans la rivière.
J'ai drôlement pris le coup de main. Les truites, c'est vachement rapide ! Faut faire vinaigre pour les choper par les ouïes avant qu'elles se débinent. Elles sont là, tapies dans les creux de rochers, à peine si elles bougent un peu la queue, et l'instant d'après, y a plus rien.
J'y ai mis du temps, avant de piger le truc, mais maintenant, y en a pas beaucoup qui m'échappent.
J'attrape aussi des lapins, ou des écureuils. Je les tire avec une pierre. Là aussi, faut le coup d'œil. C'est plutôt vif, ces bêtes, et si on a pas bien visé… Mais je m'y suis mis, et comment ! Je les étends roides d'un coup. J'ai essayé de poser des pièges, en tressant une sorte d'herbe, mais je sais pas pourquoi, ça a pas trop bien marché. Je me débrouille mieux avec les cailloux.
C'est moi qui apporte toute la nourriture. Man, si j'étais pas là, sûrement qu'elle crèverait de faim. Y a bien des baies, par-ci par-là, mais y a aussi des ours qui les bouffent, ces baies. Et ceux-là, j'aime mieux pas leur disputer leur dîner. Y me foutent la trouille.
J'en ai vu souvent qui péchaient dans la rivière. Sont rigolos, y sont aussi rapides que moi. Y se plantent dans le courant, et y font sauter les truites en l'air d'un coup de patte. Ça vaut le coup d'œil.
J'aime bien les regarder, mais je m'approche pas trop. J'aurais l'air fin, en face d'un ours, avec mes petits cailloux à tirer les lapins. En un sens, c'est dommage, ça ferait un rudement gros tas de viande. On pourrait essayer d'en fumer un peu pour l'hiver. Quand je pense à tous ces fusils qu'on avait ! J'en suis malade. L'hiver ça m'inquiète bougrement.
Encore heureux que j'aie dégotté un moyen pour faire du feu. Au début, moi et Man, on bouffait les poissons tout crus. Ça lui plaisait pas, à Man, elle mangeait presque rien. À moi non plus, faut dire. C'est comme ça que je me suis rappelé cette histoire que j'avais lue en bandes dessinées. Ces types qui faisaient du feu en frottant des silex.
Je savais pas trop ce que c'était, des silex, mais j'ai cogné l'une contre l'autre toutes les pierres que je rencontrais, jusqu'à ce que j'en trouve deux qui fassent des étincelles.
Seulement, les mecs de l'histoire, y z'avaient pas l'air d'avoir autant de difficultés que moi. Bon Dieu ! Ce que j'ai pu suer avant de réussir ! Jusqu'à ce que j'aie trouvé cette espèce de mousse sur les vieux troncs d'arbres, y a pas eu moyen de seulement obtenir une petite flamme. Ces étincelles, c'est bougrement petit. Faut quelque chose qui soit rudement inflammable, pour que ça gaze.
Y a des fois où je trouve ça rigolo, cette vie. Je suis tout à fait comme Tarzan. J'attrape ma nourriture moi-même, je fais du feu, et tout. Et j'ai la responsabilité de Man. C'est moi qu'ai dégotté la caverne, pour qu'on puisse dormir au sec. Man, elle est comme un petit moutard, elle saurait pas se débrouiller toute seule.
Je sais que Pa y serait fier de moi, s'y pouvait me voir. J'ai pas laissé tomber, j'ai pas abandonné, je tiens le coup.
Tout est venu de là, dans le fond, et de leur saloperie de guerre atomique ! Pa y disait toujours qu'on devait tenir le coup, ou tout au moins essayer.
L'était rudement malin, Pa, et il avait rudement tout bien goupillé. Depuis le temps qu'on parlait de guerre. Il avait pris ses dispositions longtemps à l'avance. Y disait comme ça qu'y aurait plus de civilisation ni rien, si y avait vraiment une guerre atomique.
Dans le fond, c'est plutôt marrant. Tout le monde en avait une trouille bleue, de cette guerre, et personne faisait rien pour empêcher ça. Je me rappelle que Pa expliquait pourquoi on pouvait rien empêcher, mais c'était trop compliqué, je pigeais pas bien.
Moi je comprends pas que si on aime pas une chose, on fasse rien pour l'éviter. Mais peut-être que c'était comme pour moi maintenant. J'aime pas trop vivre de cette façon, et je préférerais bien être encore à la maison, comme avant, mais je peux rien y faire.
Alors Pa disait qu'on pouvait pas empêcher cette guerre, mais qu'on pouvait tout au moins essayer de sauver sa peau. Ben, sa peau, c'est à peu près tout ce qu'on a sauvé, malgré tous les préparatifs de Pa, et Pa, il a même pas sauvé la sienne. L'avait bien tout prévu, sauf que ces types viendraient !
Ça faisait bien deux ans que Pa y parlait de cette cabane qu'il avait achetée. Dans la montagne, dans un coin où y avait pas de routes ni rien, pas de voisins, et pas de villes ou de villages à des kilomètres et des kilomètres à la ronde. C'était pas loin d'une rivière, pour qu'on puisse avoir de l'eau, et Pa, il avait emmagasiné dedans, peu à peu, des quantités de vêtements, de fusils, de conserves, et des tas d'autres trucs.
Y avait des montagnes de pièges, de lignes pour le poisson, y avait même des arcs, si des fois on avait plus eu de munitions pour les armes.
Y avait des graines, pour planter, des tonnes de bougies, des réserves de pétrole pour les lampes, des piles électriques. Y avait même un petit poste portatif, pour quand même avoir des nouvelles.
Ce qui me fait le plus de peine, c'est quand je pense aux vêtements.
Y commence à faire vachement froid, la nuit, et la rivière, elle coupe comme un couteau tant elle est glacée.
Quand je pense à ces belles bottes fourrées ! Mes sandales, y a longtemps qu'elles sont mortes, et mon blue-jean, il en peut plus. Et Man, elle a rien d'autre que cette robe qu'avait été déchirée quand les types sont venus, et qu'est toute rafistolée avec des épines.
Je me rappelle, le soir où on est parti. On venait juste d'apprendre que la guerre était déclarée.
Pa, y nous a fourrés dans la jeep, Man et moi, sans même nous laisser le temps de prendre quoi que ce soit. Y disait que c'était pas la peine, que tout était prêt à la cabane.
On a laissé la maison comme ça, avec toutes les lumières allumées, et la télé qui marchait encore, avec la voix sinistre de ce type qui parlait de guerre…
Man pleurait, et Pa, il arrêtait pas de répéter : « Vite, vite, les routes vont être encombrées. »
Ça pour être encombrées, elles l'étaient ! On pouvait presque pas avancer, tant y avait de voitures. Tout ces gens qui foutaient le camp de chez eux, les uns sans rien, et les autres avec des tas de saloperies ficelées sur le toit des bagnoles ! Ça faisait une atmosphère bizarre.
Moi, j'avais pas peur, j'étais plutôt excité. Mais Man, elle arrêtait pas de pleurer, elle disait : « Uh ! mon Dieu, c'est la fin, la fin de tout ce que nous avons connu et aimé » et Pa, il essayait de la consoler, mais on voyait bien qu'il n'était pas gai non plus.
On se traînait comme des escargots, entre de longues files de bagnoles, et les gens s'interpellaient d'une voiture à l'autre, et y disaient : « Ce n'est pas possible, pas possible…» Y avait des types à pied, et y montaient sur le marchepied, et y suppliaient : « Emmenez-moi… Emmenez-moi…» Mais Pa, y leur répondait même pas, et y leur filait des gnons pour les faire descendre. L'avait l'air drôlement dur, Pa.
Je sais pas, à la fin, ça a fini par me faire tout drôle. Mon excitation est tombée, et j'ai eu plutôt envie de pleurer. On sentait tellement que les gens étaient terrifiés, et qu'on vivait une catastrophe extraordinaire !
On a mis un sacré bout de temps pour arriver !
On a quand même fini par se dégager de toutes ces foutues bagnoles, et vers la fin, les chemins étaient de plus en plus déserts. Pa, y conduisait vachement vite. Y disait pas un mot, et son visage, je sais pas, on aurait dit de la pierre. Man, elle se taisait aussi, et on l'entendait renifler dans son coin.
Après, ça a bien marché pendant quelque temps.
La cabane, elle était plutôt chouette. Je sais pas pourquoi je l'appelle une cabane, c'était presque une vraie maison, bien grande, mais elle était bâtie de rondins emboîtés les uns dans.les autres. Ça sentait bon le bois.
Pa, y m'emmenait à la chasse, et Man, elle nous faisait cuire le gibier. J'avais l'impression d'être en vacances. Pa, y m'apprenait à bien tirer. J'aimais ça.
On était au milieu d'une grande forêt de sapins bien verts. Quand on respirait, ou avait l'impression de se laver les poumons. On se baignait dans la rivière. Elle était fraîche et rapide, et elle se cognait sur les rochers avec des tas d'écume blanche. On était heureux quand même. On réussissait à plus penser à la guerre. C'était tellement désert, ce coin.
Les sapins étaient pleins de petits bourgeons verts. Quand je mordais dedans, j'avais l'impression de mâcher la forêt.
Ça, c'était au printemps.
C'est en été qu'y sont venus.
On s'était habitué, ça marchait bien. Man, elle parlait presque plus de notre ancienne maison et d'autrefois. La radio était muette, on n'avait plus de nouvelles d'ailleurs. Pa et moi, on avait planté un jardin, ça poussait bien. Et Man, elle avait réussi à faire venir quelques fleurs.
Elle était toute bronzée, Man, et ses cheveux avaient éclairci, ça lui allait bien. Pa et moi, on était d'un noir ! On se baladait tout le temps torse nu.
Y sont arrivés juste après le déjeuner. On avait tiré une table dehors, à l'ombre d'un arbre, et on venait de finir de manger. Je sais plus trop bien de quoi on parlait, mais je me souviens que j'étais tout excité, parce que Pa et moi, on avait décidé d'avoir un ours le lendemain.
Y se sont trouvés là on ne sait comment. On les avait même pas entendus arriver. Y z'avaient dû faire rudement attention, parce que le coin était plutôt silencieux. Une sale bande. Des types hirsutes et débraillés, l'air mauvais, avec des yeux… J'en ai eu peur tout de suite.
Pa s'est dressé, et Man a poussé un petit cri. L'instant d'après, la bagarre avait commencé.
Les types s'étaient rués sur Pa, et y lui cognaient dessus. Y en avait d'autres qu'avaient attrapé Man, et elle se débattait en hurlant.
Tout ce que je me rappelle, c'est que j'ai foncé dans le tas, et que j'en ai mordu un de toute ma force. Pour le reste, je me souviens de rien. J'ai reçu un grand gnon sur le crâne, qui m'a fait voir des étoiles, et je suis tombé dans les pommes.
Quand je me suis réveillé, tout était calme. J'avais horriblement mal à la tête. Ça battait et cognait dedans comme si on m'avait tapé avec un marteau. J'ai passé la main dessus, et j'ai vu que j'étais plein de sang.
Je me suis levé. Je tenais à peine sur mes jambes, ma vue était toute brouillée, et, de bouger la tête, ça m'aurait fait hurler tellement ça me faisait mal.
J'ai appelé Man, mais personne ne répondait. Ça m'a foutu une trouille, ce silence ! J'ai essayé de faire quelques pas. J'avais toujours aussi mal au crâne, mais c'était moins brouillé autour de moi.
C'est alors que j'ai vu Pa. Et j'ai commencé à vomir, à vomir, je ne pouvais plus m'arrêter. Mon estomac se soulevait avec de grands hoquets, et, à chaque fois, j'avais des taches blanches et brillantes devant les yeux.
Ces salauds… Ces salauds… Pa avait plus de figure. Y lui avaient défoncé la tête. Je pouvais plus regarder. Y avait plus rien qu'une bouillie rouge, avec des mouches qui bourdonnaient dessus. Oh ! mon Dieu !
Et la cabane… Y avait plus de cabane. Rien que des tisons noircis, qui fumaient et rougeoyaient, et de la ferraille noire et tordue.
Le soir arrivait tout doucement, les oiseaux piaillaient dans les arbres, et tout était comme ça !
Je me suis mis à gueuler après Man comme un fou. J'avais besoin d'elle, j'avais besoin de cacher ma tête contre elle et de pleurer tout ce que je savais. Mais Man répondait toujours pas.
J'ai commencé à hurler de terreur. Man ! Qu'est-ce qu'y avaient fait à Man ? Peut-être qu'elle était morte, elle aussi.
Je l'ai trouvée, à la fin. Sous un arbre, à la lisière du bois. Elle était pas morte, mais elle en valait guère mieux. Sa robe était toute déchirée, elle avait la figure bleue de coups, et elle saignait de la bouche.
Quand je suis arrivé, elle gémissait un peu, mais dès qu'elle m'a vu, elle s'est mise à hurler. Elle me regardait avec des yeux fous, comme si… comme si… c'était pas moi qu'elle voyait.
Si je m'en suis sorti, c'est bien parce que je me suis rappelé ce que disait Pa. Qu'il fallait toujours essayer de faire front. J'étais bien sûr que Pa avait pas cédé, et qu'y s'était battu jusqu'au bout, jusqu'à ce qu'y puisse plus.
J'ai traîné Man jusqu'à la rivière. J'ai lavé ses plaies et les miennes. Cette nuit-là, on a dormi dans les bois. J'avais pas peur des bêtes. Elles pouvaient pas nous faire plus de mal que ces types…
J'ai emmené Man bien loin de la cabane. Ça servait à rien de rester là, y avait plus rien.
Des fois, je me désole. J'ai pas pu enterrer Pa, j'avais même pas un outil. J'ai mal au cœur quand je pense que… Oh ! et puis ça rime à rien de se faire de la mousse pour des trucs auxquels on peut rien.
Voilà, c'est depuis ce temps-là que Man elle est comme ça. On dirait qu'y a quelque chose de cassé en elle. Elle est devenue vieille, d'un coup. Et je peux compter sur elle pour rien. Faut que je m'occupe de tout.
Je me fais bougrement du souci. Si des fois on tombait malade… Pa, l'avait entassé un tas de médicaments, et y avait des livres de médecine, et des machins de ce genre. Mais tout est parti en fumée. Je me demande si ces types ont emporté des trucs, avant de foutre le feu au reste. Sûrement que oui.
Bon Dieu, je voudrais bien qu'on ait encore la cabane ! Qu'est-ce qu'on va faire, quand l'hiver sera là ? Y commence à faire de plus en plus froid. L'autre matin, quand je suis sorti, l'herbe était toute blanche de gelée. On a pas de vêtements ni rien, on a même pas de chaussures. J'ai bien essayé de faire sécher les peaux des petites bêtes que j'attrape, j'aurais pu tâcher de les coudre ensemble, mais y a rien eu à faire. Ça pourrit tout de suite. Doit y avoir un moyen spécial pour ça, mais j'y connais rien. Pa l'aurait su, peut-être…
Si la neige se met à tomber…
Je peux pas penser à ça, ça me rend dingue. Pa disait qu'y aurait bougrement de la neige par ici, l'hiver. Je vais sûrement plus trouver de bêtes à chasser. On va crever de faim ! Si la rivière se prend, je vois pas comment je pourrai encore attraper du poisson. Déjà, l'eau est tellement froide que j'en sors tout bleu quand je vais pêcher. Faut que je galope pendant un bon moment pour que ma circulation se rétablisse.
Fait bougrement froid la nuit, aussi. Faut tout le temps que je me réveille pour remettre du bois dans le feu. Comment que je pourrai bien faire, quand y aura de la neige haut comme moi, pour trouver des branches à brûler ? Je suis à moitié nu, on peut pas se balader dans la neige comme ça ! J'en ai bien entassé un peu dans la caverne, mais j'ai idée que s'y fait vraiment froid, y va pas durer bien longtemps…
Et manger ? Bon Dieu, comment que je vais encore trouver à manger ?
Paraît qu'y a des loups, en plus. Pa l'avait dit. Doit sûrement y en avoir. La neige et les loups, ça va bien ensemble. Dieu sait si j'en ai lu, de ces histoires où les types se faisaient bouffer par les loups. Mais je pensais tout de même pas que ça pourrait m'arriver à moi ! Qu'est-ce qui arrivera à Man, si…
Je voudrais bien pas me faire tellement de bile, ça me rend malade, à la fin, de penser à tout ça.
Mais faut bien que j'y pense, l'hiver va arriver, c'est sûr.
Je voudrais bien avoir quelqu'un qui me dise ce que je dois faire.
Ces salauds qui ont tué Pa…
Et leur guerre atomique… Leur nom de Dieu de saloperie de guerre atomique…
Je devrais peut être essayer d'emmener Man avant qu'y soit trop tard, et tâcher de trouver du secours. Mais Pa disait qu'y devait plus rien y avoir, la radio ne connaît plus de nouvelles.
Y a aussi cette histoire de radio-activité… J'ai pas un de ces compteurs machin, moi, qui crépite pour dire où qu'y faut pas aller. Y en avait un à la cabane…
Et en plus, si tous les types doivent être comme ceux qui sont venus… Peut-être que le monde est devenu fou… Peut-être qu'y vaut mieux se faire bouffer par les loups, en finale…
Je sais pas… Je sais vraiment pas…
Mais nom de Dieu, qu'est-ce qu'on va faire, quand l'hiver sera là ?
PLUS DE MANUSCRITS, S. V. P. !
Depuis le lancement de « Fiction », près de 800 nouvelles françaises nous ont été soumises en vue d'une publication éventuelle. À l'heure actuelle, plus de 70 de ces nouvelles sont retenues pour nos numéros à venir. À raison de 2 ou 3 par numéro – chiffre maximum que nous observons – nous sommes couverts en manuscrits français pour plus de deux ans à l'avance. Il est donc inutile de nous soumettre de nouveaux manuscrits, dont nous ne serions même pas en mesure d'assurer la publication. Nous prions tous les auteurs de bien vouloir tenir compte de cet avis et nous nous excusons d'avance de ne pas leur répondre ou cas où ils nous communiqueraient quand même leurs récits.